L’école du Châtaignier d'Eyburie
Le 26 mai 1895, le conseil municipal chargea le maire, Pierre Maze, de s’informer auprès de l’Administration des conditions requises pour un projet de construction d’une maison d’école, destinée à remplacer celle des Canardières trop exiguë étant donné le nombre d’élèves inscrits.
Après les élections de 1896, les élus décidèrent de choisir définitivement un endroit pour y bâtir la nouvelle école. Le 15 novembre, le maire, M. Pradel de Lavaux accompagné de Mrs Bioulou, Chalard et Condé, se rendit sur les lieux pour recueillir les sentiments des villageois. Les avis divergeaient : il proposa donc de demander conseil auprès de l’inspecteur primaire qui prendrait une décision impartiale sans se préoccuper de plaire aux habitants de tel ou tel village. La commission désignée à cet effet, opta donc, selon les recommandations de l’inspecteur pour une parcelle de terrain située au village du Châtaignier et appartenant au Sieur Joseph Coissac. En effet, après étude, il s’avérait que le transfert au village du Châtaignier, de la classe des Canardières se justifiait car c’était là que l’école serait le mieux située, que l’on prenne en compte la distance des différents hameaux concernés ou le chiffre de leur population.
“[...]
Actuellement, l’école est installée au hameau des
Canardières distant
du Châtaignier de 2,100
km.
Il y a donc lieu d’examiner l’affaire au double point de
vue du changement de siège et du choix de l’emplacement
nouveau.
I.
Transfert de l’école
Le
conseil municipal demande le transfert de l’école pour
donner satisfaction aux villages de Nussas, de la Nauche, du
Châtaignier, du Verdier, de Lascaux, de Maffreix et de la
Rougerie, qui se trouvent plus éloignés des Canardières
que du Châtaignier. Les chemins desservant ces villages étant
mauvais, les habitants apprécient d’autant plus le
rapprochement de l’école. Le plan topographique de la
circonscription de l’école, [...] montre bien d’ailleurs
que le village du Châtaignier est sensiblement au centre de la
circonscription scolaire. Si on fait entrer en ligne de compte le
chiffre de la population de chacun des villages, on voit que le
transfert se justifie encore. En effet : 1er. 246 habitants sont plus
rapprochés du Châtaignier que des Canardières ;
2ème. 45 seulement en sont plus éloignés ; 3ème.
202 (Chavagnac) sont à une distance sensiblement égale
des deux hameaux.
Pour
ces motifs, considérant en outre que la circonscription
scolaire de l’école des canardières ne s’étend
que sur la commune d’Eyburie, qu’ainsi les quelques
hameaux de Condat dont les enfants fréquentent l’école
des Canardières, ne pourraient valablement protester, je suis
d’avis que le transfert de l’école au village du
Châtaignier soit demandé au conseil départemental.
[...]”
Le
24 avril 1898, après examen des rapports de Mrs les
inspecteurs, la commission mixte des bâtiments scolaires
suggéra diverses modifications au projet, à savoir
:
_
L’école devrait être construite dans l’angle
postérieur droit de manière que la cour se trouve tout
entière en avant pour faciliter la surveillance des
élèves.
_ La longueur de la salle de
classe serait portée à 10 mètres de
façon que celle-ci puisse être transformée en
deux pièces par une cloison pour obtenir un poste
double.
_ Deux portes devraient être
percées sur la façade et les fenêtres
élargies.
_ Le logement mal conçu
serait aménagé plus commodément.
_ La construction d’un
puits et d’un mur de clôture devait être
envisagée.
_ Les cabinets avec système
de “tinettes mobiles” seraient distincts pour les filles
et les garçons et séparés.
_ Des soupiraux seraient prévus
sous la salle de classe pour le renouvellement de l’air.
“[...]
I. Plan d’ensemble :
a
:
Il
serait préférable, à mon avis que le bâtiment
fût construit dans l’angle postérieur de droite du
terrain. La cour se trouverait ainsi tout entière en avant et
la surveillance serait beaucoup plus facile, car la maîtresse
pourrait apercevoir ses élèves en prenant son
repas.(...)
II. Salle de classe :
a
:
Dimensions
: La longueur me paraît insuffisante. L’école a eu
70 inscriptions en 1897. Tout porte à croire que l’effectif
au lieu de diminuer ira en croissant. Je crois donc qu’il
faudrait une salle de 10 m
de
long. De la sorte, si dans quelques années le dédoublement
du poste devenait nécessaire, il suffirait d’une simple
cloison pour obtenir deux salles de classe convenables. La hauteur
prévue n’est que de 3,50 m, il y a lieu de la
porter à 4 m.
b
:
Entrée
: Au lieu de faire l’entrée sur le pignon, j’aimerais
mieux la placer sur la façade d’avant. Et en prévision
du dédoublement possible, il y aurait lieu de faire deux
portes une dans chaque angle.
c
:
Fenêtres
: Elles n’ont pas une largeur suffisante. Aux termes de
l’instruction ministérielle du 18 janvier 1887, les
châssis doivent être divisés en hauteur en 2
parties s’ouvrant séparément pour la ventilation.
La même instruction recommande de réduire à
0,20 m la distance entre la partie haute de la fenêtre et
le niveau des plafonds.
III.
Logement personnel :
La
disposition adoptée ne me paraît pas très
heureuse. Pour aller au grenier ou à la cave, il faut
traverser tous les appartements ce qui est fort incommode. On
éviterait cet inconvénient et on pourrait ménager
une 2ème chambre à coucher en pratiquant extérieurement
dans le pignon une porte donnant accès à la cave et au
bûcher et en plaçant dans la cuisine la cage de
l’escalier qui conduirait au grenier. Une croisée serait
placée dans la façade postérieure pour éclairer
cette 2ème chambre. Quant à la chambre à coucher
contiguë à la salle à manger, il y aurait lieu de
la disposer de telle sorte que deux lits au besoin pussent y être
mis. J’estime aussi qu’il faudrait une cheminée
dans la salle à manger. Le décret du 25 octobre 1894
prévoit en effet pour les écoles de hameau, en dehors
de la cuisine-salle à manger, deux pièces à feu.
Enfin, il serait désirable que dans la cuisine un placard au
moins fût ménagé.
IV. Annexes :
a
:
Le
puits, la palissade et le mur de clôture et les contrevents ne
sont pas prévus au devis, cela semble indiquer qu’on
veut en ajourner l’exécution. Il importe à mon
avis de les comprendre dans le devis.
b
:
Il
serait désirable qu’un préau fût aussi
prévu.
c
:
Cabinets
d’aisance : Les cabinets doivent être distincts pour les
garçons et pour les filles et ne pas être contigus.
[...] Il faut préciser le mode de vidange (tinettes mobiles ou
fosses). je crois qu’il vaudrait mieux employer le système
des tinettes mobiles.
V.
Détails divers :
a
:
On
n’a pas prévu de soupiraux pour le bûcher et la
cave, ni pour le dessous de la salle de classe. Il faut cependant que
l’air puisse se renouveler sous le plancher afin d’éviter
la détérioration du bois.
b
: Il
y a lieu enfin de prévoir des dauphins pour les tuyaux de
descente.
Veuillez agréer, Monsieur le Préfet,
l’assurance de mes sentiments respectueux et
dévoués.
L’Inspecteur
d’Académie”
Une subvention de 6 210 F fut allouée à la commune pour la construction de la nouvelle école. Le montant total du devis se chiffrant à 13 500 F, la municipalité fut autorisée à contracter un emprunt de 7 290 F à la caisse des retraites pour la vieillesse au taux de 3,85 % remboursable en 30 ans à partir de l’année 1900. L’annuité, payable en deux termes semestriels, s’élevait à 408,24 F.
Le 15 juillet 1900, le conseil municipal nomma 2 délégués Mrs Marc Dupuy et Vermeil de Conchard pour assister à l’adjudication des travaux de la maison d’école du Châtaignier qui aurait lieu à Tulle le 26 juillet 1900. Cinq entrepreneurs avaient déposé leur soumission :
_
Lavaux Jean, charpentier à Uzerche
_ Brousse
Pierre, entrepreneur au Lonzac
_ Chastre Jean,
entrepreneur à Juillac
_ Dubois Guillaume,
entrepreneur à Saint Martial de Gimel
_ Nauche
Jean, charpentier à Condat
M.Brousse,
entrepreneur au Lonzac ayant proposé le plus fort rabais -7%
sur le montant des travaux- fut chargé de la construction.
En 1905, la municipalité demanda la création d’un double poste (une classe de filles, une classe de garçons), les locaux récemment bâtis ayant été conçus pour deux salles. Ce souhait fut à nouveau formulé en 1907, 1908, puis, en 1909.
Le 5 mai 1910, le maire donna lecture d’une lettre de M. le préfet, l’informant de la transformation de l’école mixte du Châtaignier, en une classe de garçons et une classe de filles. La commune se chargea de faire installer une cloison en bois de pin pour partager la pièce existante dans le sens de la largeur. Les frais de transformation de l’école mixte du Châtaignier en un poste double s’élevèrent à 350 F.
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Des travaux conséquents furent réalisés en 1937, après l’adjudication qui s’était déroulée, le 28 février, à la mairie d’Eyburie en présence du maire Maxime Condet et des conseillers Mrs Jammot, Nauche et Fageardie. Il s’agissait dans un premier temps de bâtir une pièce supplémentaire afin d’allonger le logement de l’instituteur, d’agrandir et d’empierrer la cour, de rejointoyer les murs des préaux, de poser deux lavabos à cinq robinets et deuxièmement de reconstruire les murs de clôture devenus dangereux pour les enfants. Un marché de gré à gré fut passé avec l’entreprise Pinardel de Tulle qui avait proposé le plus fort rabais (0,10 centime par franc). Un emprunt fut contracté auprès du crédit foncier au taux de 5 % et remboursable en 30 ans, l’apport de la commune se chiffrant à 20 000 F et la subvention allouée par le ministère à 27 300 F |
Une parcelle de 8,50 m de large sur la largeur de la cour fut achetée à M. Mournetas pour un montant de 250 F afin d’agrandir la cour.
En 1950, des préaux furent construits sur cette portion de terrain.
En 1960, l’une des classes fut supprimée.
Et puis, à la rentrée 1962, la classe unique du Châtaignier ferma, obligeant les élèves à fréquenter l’école du bourg et le ramassage scolaire fut instauré pour tous les écoliers de la commune.
Une colonie de vacances s’installa alors dans les locaux désaffectés pendant l’été 1963. Puis, une deuxième en 1967. Mais, le centre ne remplissant pas les conditions exigées par la réglementation en vigueur, le préfet en imposa la fermeture en août 1971. En effet, diverses infractions préjudiciables aux enfants accueillis avaient été relevées par les services sociaux à l’encontre du directeur de la colonie.
“_
direction d’une colonie de
vacances sans diplôme
_ absence
de presque toutes les pièces administratives, comptables ou
sanitaires requises
_ qualification
du personnel d’encadrement discutable
_ installations
précaires, W.C. malodorants, cuisine exiguë,
réfrigérateur trop petit, literie assez mince et
sale
_ absence
de téléphone
_ absence
de menus et de réserves alimentaires et, apparemment
participation importante des enfants aux
tâches ménagères”
Finalement, en 1974, le conseil municipal considérant que l’école du Châtaignier n’avait plus aucune utilité pour la commune décida la mise en vente aux enchères publiques de l’immeuble avec toutes ses dépendances.
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L’ensemble fut acquis par un particulier, seul enchérisseur, pour un montant de 100 500 F. La somme récoltée par la commune lors de cette vente servit à l’achat du terrain pour la création du lotissement de Sagnes. |
Les enseignants de l'école du Châtaignier
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Pierre Counil et Annie Fadernat
Sources : Archives communales et départementales, registres des délibérations du conseil municipal